Bullet park
Par le collectif Les Possédés Un texte de John Cheever
Le revers de l’american way of life
La pelouse est d’un vert vif. Quelques gentils nuages moutonnent au sein d’un beau ciel bleu. À l’intérieur de la maison : un poste de télévision, des réfrigérateurs, une table de cuisine, des chaises, un lit... C’est dans ce décor de pavillon de banlieue interchangeable que vivent les Nailles, une famille de la classe moyenne américaine qui, malgré les perspectives de bonheur que promet la frénésie consumériste des années 1960, va connaître le revers de cette belle médaille.
Adapté au théâtre par le collectif Les Possédés, le roman de l’écrivain américain John Cheever (publié en 1969) présente des personnages confrontés à un quotidien qui dérape. Il y a quelque chose de la série télé dans ces existences ordinaires présentées de manière hyperréaliste, dans ce mélange de drame et de ridicule, dans le jeu très naturel des comédiens. « John Cheever parvient à tenir à distance la gravité du sujet pour laisser naître des situations humoristiques quasi-surréalistes », explique le metteur en scène Rodolphe Dana. Des situations d’une grande causticité, qui révèlent les fêlures d’une société ébranlée au plus profond d’elle-même.
« Écrivain américain des années 60, John Cheever est surnommé « Le Tchekhov des banlieues ». Toute sa vie, il s’est attaché à dépeindre cette middle class sans histoire à décrire le déchirement de ces êtres tiraillés entre le carcan de la norme et le désarroi existentiel. Bullet Park en est l’exemple parfait : une banlieue aisée où vivent les Nailles, charmante famille unie. Et pourtant un matin, leur jeune fils Tony refuse de se lever et sombre dans la dépression. Le père se met à absorber des tranquillisants, la mère cherche un gourou pour guérir son fils. Mais les façades des pavillons cachent bien d’autres secrets, et le tableau idyllique se fissure davantage avec l’arrivée de cet étrange voisin : Paul Hammer, qui s’est donné comme but dans la vie de crucifier le rêve américain… Avec un humour noir mais une tendresse sincère, Cheever invente des personnages ordinaires et les confronte à des situations inédites. Il les fait douter jusqu’à l’absurde et l’effroi. Il ébranle leurs croyances, leurs morales et leurs psychismes. On suit avec compassion et curiosité leur débâcles intérieures. Il n’y a pas de cynisme, juste de la fragilité. Bullet Park décrit avec causticité cette Amérique bien-pensante et en révèle les fêlures. Certes, nous sommes dans les années 60-70, mais les grandes oeuvres ne se soucient ni du temps, ni de la géographie. La consommation, le matérialisme, la foi, l’adultère, le paradis perdu, le déni, la solitude, la psychologie, les secrets, les non-dits, le couple, l‘adolescence… Tous ces thèmes qui émaillent le roman sont dépeints ici avec une telle acuité et d’un point de vue si humain, qu’ils me font dire, que si l’apparence d’une société change (les vêtements, les voitures, les bâtiments…), les êtres humains qui la composent demeurent — dans les grandes oeuvres —inchangés. » Rodolphe Dana, metteur en scène
SALON D'ECOUTE
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